Proteus n°20

J’ai le plaisir de vous annoncer la parution du numéro 20 de la revue Proteus – Cahiers des théories de l’art, intitulé « L’ère numérique du style », codirigé avec Athina Masoura. Nous en corédigeons logiquement l’édito et l’introduction (« Le style à l’épreuve des pratiques numériques »).

Le numéro est consultable à l’adresse suivante : http://www.revue-proteus.com/parus.html#20

Vous pouvez accéder aux articles individuellement en cliquant sur leurs titres, ou télécharger l’ensemble du dossier à l’aide du lien suivant : http://www.revue-proteus.com/Proteus20.pdf

Sommaire

L’ère numérique du style
– Le style à l’épreuve des pratiques numériques – Introduction au dossier, Athina MASOURA (université Toulouse Jean Jaurès — LARA-SEPPIA ) et Anthony RAGEUL (université Toulouse Jean Jaurès — LARA-SEPPIA)
Ut pictura pixelus, ut pixelus pictura ? – Le style à l’épreuve de la matière, Chloé PERSILLET (université Paul Valéry Montpellier 3 — ED 58 – RIRRA 21)
– Les technologies numériques au cœur du processus créatif – L’émergence d’un hyperstyle, Christophe PIQUE (université de Rouen — Métiers du Multimédia et de l’Internet)
– Poésie sur réseaux sociaux : un nouveau style populaire ? – L’exemple d’Elvira Sastre, Lucie LAVERGNE (université de Clermont-Ferrand — CeLiS)
– Arthur Jafa : défier les notions de style et d’auteur dans une œuvre numérique, Adrian FIX (King’s College — Film Studies)
– Marque de style, trace de présence – Jeu vidéo, du produit à l’œuvre, Thierry SERDANE (université Paul Valéry Montpellier 3 — RIRRA 21)
– De l’Inattribuable dans l’Art ? – Du droit à l’IA : «Ceci est de toi.», Morgan MORCEL (université Nice Côte d’Azur — CRHI)
– Que peuvent les machines nous apprendre du style ?, Pia BALTAZAR (Société des Arts Technologiques, Montréal, QC) et Kıvanç TATAR (Chalmers University,Goteborg, SE)
Hors thème
– De la perception à l’action – L’expérience esthétique et phénoménologique des paysages nordiquescomme conscience existentielle, Alexandre MELAY (université de Lyon / Aix-Marseille Université — LESA)

IA et BD

Reproduction d’une réaction à chaud sur les réseaux sociaux après avoir rattrapé le retard de l’actualité en matière de bandes dessinées et intelligence artificielle. (Attention: je remets les pieds dans les polémiques de la fin des années 2000 à propos de la bande dessinée numérique, alors forcément, ça m’agace un peu…)

Aujourd’hui, dans le cadre de mes travaux de recherche, je rattrape un peu mon retard sur l’actualité et me renseigne sur les bandes dessinées créées au moyen d’IA génératives… et sur les réactions que ça suscite. Ca me renvoie beaucoup à l’époque où j’ai commencé à « prêcher » publiquement pour la bande dessinée numérique et que certains rejetaient violemment l’idée même d’une telle bande dessinée.

Je fais allusion plus particulièrement aux levées de boucliers (voire brandissement d’épées!) face à l’annonce de la publication de Mathis et la forêt des possibles (Jiri Benovsky) et de initial_A (Thierry Murat), jusqu’à la rupture du contrat par l’éditeur pour le second, sous les pressions. Bien sûr que les IA posent tout un tas questions éthiques, juridiques, artistiques, politiques, etc., auxquelles il faudra répondre. Bien sûr, à terme, je pense que le tout-venant du travail de conception graphique et de création leur sera confié. Mais face à la crainte de voir les éditeurs « évincer » les auteurs (c’est la Ligue des Auteurs qui parle d’« éviction »), je ne comprends pas du tout la réaction au mieux attentiste, au pire technophobe, de mes camarades…

On ne peut pas attendre que le législateur ait légiféré. On ne peut pas attendre que les éditeurs aient réellement remplacé les dessinateurs. C’est bel et bien aux artistes, aux auteurs, de s’emparer des outils de l’IA avant que les éditeurs ne le fasse en les remplaçant. C’est aux artistes qu’il appartient de ne pas laisser l’IA leur échapper. Elle doit devenir un de leurs outils pour ne pas devenir leur fossoyeur. (Sans compter que la bande dessinée s’illustre une fois de plus par son retard considérable sur les pratiques artistiques contemporaines…) Murat et Benobsky ouvrent la voie, chacun à leur façon. Encore aurait-il fallu entendre leurs propos pour comprendre que cette démarche était justement exploratoire, expérimentale, et finalement artistique. (Je ne parle là que de leurs intentions et démarches, je ne préjuge pas de la qualité de leurs livres que je n’ai pas vus.)

Vers 2010, je disais à qui voulait l’entendre (et ils n’étaient pas nombreux) que c’était aux auteurs de s’emparer du numérique avant que les éditeurs n’encapsulent salement toutes les bandes dessinées dans des « 48CC numérique », tels que je qualifiais alors les formats de lecture. Ca ne m’amuse guère aujourd’hui de redire la même chose à propose des IA… Je ne suis pas technophile, tout mon travail de recherche-création en témoigne depuis quinze ans. Je ne dis pas qu’il faut tous se mettre benoîtement à « prompter » toute la journée. Ce que j’essaie de dire, c’est que les artistes sont les mieux placés pour s’approprier ces outils et les tordre à leur manière, pour (re)devenir maîtres du jeu et donc indispensables à l’économie de la création.

Pour conclure, je propose de lire cette interview de Thierry Murat, qui explique bien sa démarche et décrit bien son processus de création.

Vers une disparition des interfaces graphiques?

« Vers une disparition des interfaces graphiques? La bande dessinée numérique au prisme du webdesign. » Tel est le titre de mon dernier article scientifique, en ligne depuis une semaine au sein de la thématique « Ce que le numérique fait à la bande dessinée » co-dirigée par Gaelle Kovaliv et Olivier Stucky, de la revue Comicalités. Pour lire, cliquer directement sur le lien ci-dessus. Résumé:

Ce texte a pour point de départ une intuition affectant ma pratique artistique d’auteur de bande dessinée numérique : on assisterait concomitamment à une désaffection progressive des écrans d’ordinateurs par le public au profit des écrans des smartphones et à un appauvrissement progressif du design des interfaces graphiques. Le texte questionne d’abord cette intuition. Est-ce que l’hypothèse d’un appauvrissement ou d’une disparition des interfaces graphiques se vérifie ? En quittant provisoirement le champ de la bande dessinée numérique, le texte ébauche les contours d’un contexte historique et esthétique plus large dans lequel il paraît aujourd’hui nécessaire de la situer : celui du webdesign. L’analyse comparée d’un corpus de sites web dits créatifs et de bandes dessinées numériques, chapeautée par les notions d’énonciation éditoriale, d’architexte et de récit-interface, conduit à préférer parler d’inapparence et d’effacement des interfaces graphiques. Cette analyse permet aussi de retracer une histoire commune de la bande dessinée numérique et du webdesign dans laquelle des résonances plastiques se jouent entre les deux champs. Le texte fait alors l’hypothèse que tabularité de la bande dessinée, modularité des interfaces graphiques et régime multimédia sont intrinsèquement liés, s’ajustent les uns en fonction des autres, et qu’ils deviendraient caducs avec l’usage de technologies émergentes comme la réalité virtuelle.

Journée d’étude Repenser la notion de style (…) à l’ère numérique

Dans la foulée du colloque de Lausanne aura lieu la journée d’étude « Repenser la notion de style dans les pratiques artistiques contemporaines à l’ère numérique » que j’ai le plaisir de codiriger avec Athina Masoura. La journée se déroule le lundi 25 octobre à l’Université Toulouse Jean Jaurès. Nous y accueillons huit intervenants et invitons l’artiste-chercheur Samuel Bianchini.

>> Lire le programme <<

Participation au colloque Formes narratives et supports médiatiques (II)

J’interviendrai dans le colloque Formes narratives et supports médiatiques (II): « Transferts, reconfigurations et transition numérique dans la bande dessinée », à Lausanne du 21 au 23 octobre prochains. L’événement promet d’être mémorable, réunissant une bonne partie des chercheurs qui consacrent tout ou partie de leurs travaux à la bande dessinée numérique.

Je donnerai pour ma part une communication intitulée « Vers une bande dessinée numérique post-interface? » le vendredi matin et participerai à une table ronde en compagnie de Yannis La Macchia et Lisa Mandel le samedi.

Ci-dessous le programme du colloque.

La méthode de recherche-création en Arts Plastiques: prescription, prospective et mise à l’épreuve de l’objet

On continue décidément dans la série des annonces liées à mon activité scientifique, puisque c’est aujourd’hui que sort le dernier numéro de la revue Belphégor, Littératures populaires et cultures médiatiques, qui publie une partie des actes d’un colloque auquel j’avais participé en 2018. Il résulte de cette communication un article qui contribue à sa façon à alimenter les réflexions en cours un peu partout sur les méthodologies de recherche et d’évaluation en arts plastiques: « La méthode de recherche-création en Arts plastiques: prescription, prospective et mise à l’épreuve de l’objet ». Cliquez sur les liens dans le texte pour accéder aux ressources; résumé de l’article ci-dessous:

La méthode de recherche-création propre aux arts plastiques place l’universitaire dans une position atypique : celle de chercheur-artiste, impliqué lui-même dans la construction de l’objet qu’il se propose d’étudier. Si on peut justifier cette méthode en faisant des analogies entre la démarche scientifique et le processus de création de l’artiste (Toulouse 2012), cela n’est pas sans poser problème en pratique. Ainsi, si les arts numériques et technologiques notamment ont permis d’établir des partenariats institutionnels associant création et ingénierie, il apparaît que la partie création reste souvent la plus difficile à valoriser (Fourmentraux 2011). Je discute ici des apports et des écueils ou difficultés de cette méthode dans ma propre thèse portant sur la bande dessinée numérique (2014). Pour cela, je la mets en perspective avec trois thèses qui ont été soutenues sur cet objet entre 2010 et 2016 dans différents champs disciplinaires. Cette étude comparative met en lumière trois démarches plus spécifiques à la recherche-création : prescription, prospective et mise à l’épreuve de l’objet.

Article dans Formules n°22

Reçu aujourd’hui: Littératures, performances & technologies, vingt-deuxième numéro de Formules, revue des créations formelles, dirigé par Lucile Haute et Alain Deneuville. Très bel objet qui, au-delà de sa thématique, devrait faire date dans les travaux sur la recherche-création, puisque les contributions prennent les formes les plus variées, interrogeant par l’expérimentation les modalités de publication et d’évaluation de la recherche en art. J’y contribue de façon très classique pour ma part, avec un article académique intitulé « Contraintes de création et émergence de « modes performatifs de création » dans la pratique du récit-interface », dont voici le résumé:

Ma pratique du récit-interface – locution qui désigne différentes manifestations du récit numérique – semble avoir une certaine propension à me conduire à des réalisations et des activités qui possèdent un caractère performatif. Je constate ce phénomène dans au moins quatre de mes productions ou activités depuis 2011. Suivant une méthodologie de recherche-création, cet article a pour objectif d’opérer un retour sur trois d’entre elles et d’analyser plus précisément sous quelles formes et modalités se manifeste leur caractère performatif. Ces analyses mettent en évidence l’émergence de « modes performatifs de création » articulés à l’emploi de contraintes de création. Ces modes impliquent de mettre en perspective ou de réévaluer un certain nombre de notions travaillées par la création de récit-interface telles que, entre autres, l’improvisation ou le jeu.





Récit-interface: une catégorie pour penser les récits numériques

Nouvel article scientifique au ton volontiers spéculatif publié dans le dernier volume de la revue Ligeia (n°181-184) qui consacre un dossier au Net Art. Il faudra excuser quelques erreurs dans les notes de bas de page dues à des problèmes lors de la mise en page de la revue…

Résumé: J’emploie parfois la locution « récit-interface » pour désigner mes créations (bandes dessinées numériques). Jusqu’alors, je n’ai jamais défini explicitement cette locution venue spontanément combler une difficulté à nommer mon objet de recherche. Elle me semble aujourd’hui une catégorie stimulante pour aborder un certain nombre de médias et pratiques artistiques numériques. Le présent texte développe l’hypothèse que le récit-interface pourrait être un outil méthodologique intéressant pour mieux saisir les récits numériques par-delà les formes qu’ils prennent et les frontières qui délimitent les différents médias numériques. A cet égard, une partie des productions relevant du Net Art (les plus narratives) pourraient être abordées comme récit-interface. Le récit-interface peut permettre de penser ces récits, en complémentarité avec d’autres notions telle que celle d’hypermédia.

La revue est également disponible sur la plateforme Cairn.

« Images fragiles » dans étapes: n°242

« Images fragiles », un article sur le gif animé et les images activables, est paru dans le numéro de mars-avril de la revue étapes:. Je prends pour prétexte une sélection de dispositifs désormais iconiques de la bande dessinée numérique pour esquisser quelques réflexions esthétiques sur le caractère profondément instable de ces images.